Bushido : le code moral des samouraïs

Bushido

Pour qui s’intéresse un tant soit peu à la culture japonaise ou au Japon féodal, le terme de Bushidō n’est pas inconnu. En effet, il s’agit du nom donné au code guerrier et surtout éthique que suivaient tous les samouraïs. Fondé sur sept valeurs morales, il guidait toute la vie des samouraïs japonais et pouvait même conduire à la mort. Mais d’où vient ce terme, que signifie t-il ? Et surtout que préconise t-il ? Est-il toujours d’actualité dans la société japonaise ? Autant de questions auxquelles nous allons vous répondre afin de vous éclairer sur cette notion fondamentale de la culture de l’empire du soleil levant.


L’origine du Bushidō

Bushido Signification


L’étymologie du mot Bushidō

Le Bushidō en écriture rōmaji ou 武士道 en système kanji est un mot qui dérive lui-même du chinois « wu shi dao » qui signifie littéralement la voie du guerrier. Transposé en japonais, il se compose de 3 caractères, les 2 premiers 武士 composent le terme bushi, le brave guerrier, et le dernier 道, dō la voie. Le terme traduit parfaitement ce qu’il est, c’est-à-dire un manuel de la voie que doivent suivre les guerriers.


Les débuts du Bushidō

Cette expression apparait pour la première fois vers 1616, dans un ouvrage intitulé le Kōyō gunkan mais même s’il n’apparait pas avant sous son nom, il existait déjà auparavant. Au départ, uniquement oral, il est intimement lié au Japon féodal, cette période qui s’est étalée de 1185 à 1867. À cette époque, le pays est sous le gouvernement militaire du shogun, un chef de guerre militaire mais qui joue un rôle politique en même temps. Les shoguns ont recruté des samouraïs dans leurs armées. Ceux-ci étaient entièrement dévoués à leur famille, leur clan, leur chef. Leur code de conduite était, au départ, essentiellement basé sur la culture guerrière. D’ailleurs, ce guide s’est appelé la voie de l’homme d’armes, la voie de l’arc et des flèches ou la voie de l’arc et du cheval, au fil du temps. Ceci, en fonction des styles de combat les plus en vogue du moment.

Puis, sous l’influence du shintoïsme, du bouddhisme zen et du confucianisme, la dimension morale s’est imposée de plus en plus. D’autant plus que sous l’ère Edo ou période de la dynastie Tokugawa, le pays a connu une époque plus pacifiée, moins martiale. Cela a contribué à donner une perspective plus morale et moins guerrière à la voie du guerrier. À cette époque, les samouraïs deviennent plus lettrés, plus raffinés et s’adonnent à diverses activités artistiques, comme la calligraphie ou la cérémonie du thé.

Le shintoïsme, le culte ou la religion la plus ancienne du Japon a mis la famille, les parents, les ancêtres au cœur des relations. Mais pour pouvoir faire partie intégrante de cette lignée, la mort se doit d’être respectable : mieux vaut mourir avec honneur que vivre dans le déshonneur.

Le bouddhisme zen est, par nature, la religion même du samouraï et ce, depuis l’ère Kamakura. Son apport s’est concrétisé par la recherche de la paix intérieure, le dépassement de soi et la soif de l’harmonie. Pour cela, la dimension morale et bienveillante envers l’autre est indispensable à cette quête d’élévation spirituelle personnelle.

Quant au confucianisme, il a contribué à faire évoluer le samouraï en introduisant des valeurs comme la droiture et encore la bienveillance. La loyauté, et la fidélité au seigneur sont des qualités indispensables. Rappelons que le sens initial de samouraï est « celui qui sert ». Ce respect complet de la hiérarchie impose au guerrier samouraï un engagement qui peut aller jusqu’à la mort.


Les 7 préceptes du Bushidō

Principes Bushido

Le code d’honneur du samouraï, le Bushidō, repose sur 7 principes que tous les samouraïs se doivent de suivre scrupuleusement.


義 gi : la droiture

Le guerrier samouraï se doit d’agir avec justice, il n’attaque pas un adversaire sans raison. Il se conduit avec droiture et rectitude, sans hésitation. Il fait ce qui est juste et qu’il sait être sa mission. On peut l’illustrer parfaitement avec une citation très connue d’un samouraï renommé, Taira Shigetsuke (1639-1730) : « vivre quand il est bon de vivre, mourir quand il est bon de mourir ».


勇 yū : le courage

Le samouraï n’a peur de rien et peut combattre jusqu’à la mort car il ne la craint pas. Il sait que son combat est vénérable et il y met toute sa croyance. Sa vaillance héroïque l’accompagne mais ce n’est pas un courage inconscient pour autant. Au contraire, il lui vient de la maîtrise de soi et des armes, de sa confiance en ses capacités et de sa prudence.


仁 jin : la bienveillance

L’empathie envers autrui, la bienveillance envers l’autre sont des qualités que le samouraï se doit d’avoir. Il doit être animé par la compassion et doit mettre sa force et ses compétences au service du bien. La féodalité qui le lie au daimyō, son seigneur, participe à une société d’obligations mutuelles dans une allégeance volontaire. Le souverain est lui-même redevable de bienveillance et de compassion envers son peuple.


礼 rei : la politesse

La courtoisie est indispensable, elle fait partie des vertus préconisées par le code du Bushidō. Cette politesse s’accompagne d’un profond respect. Ainsi, les samouraïs sont prévenants envers leurs adversaires, avant, pendant et après le combat. Malgré sa férocité bien connue, le guerrier samouraï respectera toujours le cadavre de son ennemi.


誠 makoto : la sincérité

Le guerrier samouraï ne ment jamais. Il reste sincère dans ses propos et également dans ses actions. Celles-ci doivent être en cohérence avec ses dires. Les samouraïs ne trompent pas leurs ennemis par des paroles mensongères. C’est une forme de respect des autres. Un guerrier qui ne serait pas sincère serait plongé dans le déshonneur, ce qui est inconcevable pour un samouraï.


名誉 meiyō : l’honneur

C’est peut-être la plus grande vertu des guerriers japonais. C’est un honneur exigeant, très rigoureux et qui ne souffre aucun manquement. Pour les samouraïs, une vie sans honneur ne vaut pas la peine d’être vécue. C’est pourquoi le guerrier samouraï s’il a failli à son honneur n’a qu’une solution pour se racheter : le suicide rituel. Connu en occident sous le terme d’hara-kiri, il est plus exact de parler de seppuku. Il va permettre de laver la faute et de retrouver son honneur.


義 chūgi : la loyauté

La loyauté du samouraï envers son daimyō est indéfectible. C’est la notion la plus importante avec le sens de l’honneur. Le samouraï ira jusqu’à sacrifier sa vie pour rester loyal à son chef. En cas de conflit de loyauté, par exemple entre 2 obligations légitimes, familiale et au seigneur, la règle sera simple. C’est l’intérêt du plus grand nombre qui l’emporte. Du coup, un guerrier samouraï fera passer en priorité la loyauté à sa nation au détriment de ses proches. Il voit l’individu comme un rouage de l’ensemble.


L’influence du Bushidō sur le Japon moderne

Bushido Japon

À partir de la fin du shogunat Tokugawa, vers 1869, l’empereur japonais a mis fin au système féodal et donc au règne des shoguns. Le nouveau gouvernement, poussé par les occidentaux, a pris un décret en 1872 qui interdisait le port ou l’utilisation d’épées en public. Cette disposition a, dans la pratique, mis fin au mode de vie des samouraïs japonais en supprimant leurs revenus. Mais même si la caste des guerriers a disparu, leur mode de pensée et de vie a durablement imprégné la culture nippone. Ainsi, la politesse et le respect sont profondément ancrées dans toute la tradition japonaise. Quant aux valeurs du Bushidō, elles ressortent particulièrement dans le domaine de l’éducation et de l’entreprise. Les jeunes japonais sont réputés pour leur respect envers l’autorité, et la recherche d’une amélioration constante qui les pousse vers l’excellence. Le goût de l’effort, la capacité à travailler en équipe, la discrétion et une organisation sans faille sont aussi des qualités reconnues des employés japonais. Autant de valeurs issues du code moral du Bushidō et qui font réellement partie intégrante de la mentalité nippone.

Mais là où le code du Bushidō garde encore tout son sens premier, à la fois moral et guerrier, c’est dans la pratique du sport et plus particulièrement les arts martiaux. La maîtrise de soi et du geste, la concentration, le fair-play, la combativité sont pratiquées activement dans des disciplines comme le judo, l’aïkido, le kendo et le karaté bushidō.

De surcroît, le code du Bushidō et ses valeureux guerriers influencent encore les autres sports. Ainsi, le baseball est un sport très populaire au Japon. Ce pays est d’ailleurs numéro 1 mondial dans cette discipline. Une rencontre très attendue aura lieu entre le Japon et l’Australie au mois de septembre 2022 et ces prochaines rencontres s’intitulent les Samurai Japan Series. Tout un symbole !

Vous aurez bien compris après cette lecture que le code du Bushidō est avant tout une philosophie, un état d’esprit. Intimement lié à l’histoire du Japon féodal et à ses samouraïs, il a influencé durablement la société jusqu’à notre époque actuelle. À n’en pas douter, sa haute valeur éthique a contribué à son succès. Le code du Bushidō a puisé dans la soif d’exigence et d’accomplissement personnel que recherchaient les guerriers japonais. C’est un écho que chacun d’entre nous peut ressentir et souhaiter mettre en œuvre : aspirer à devenir une meilleure version de soi.

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